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Les styles en calligraphie

La calligraphie de « style japonais », Wayô, 和様, s’oppose au courant de calligraphie de « style chinois », Karayô, 唐様, ce dernier s’étant développé parallèlement au Wayô au cours des périodes durant lesquelles la Chine exerça une forte influence au Japon dans le domaine des arts et des lettres.

Styles en calligraphie

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shodô Claire Seika

Wayô est un mot composé de Wa, 和, préfixe désignant le Japon, l’idéogramme se lisant aussi Yamato, « le Japon », et du suffixe Yô, 様, signifiant « style ». Wayô est dans une certaine mesure synonyme de Wafû, 和風, « style japonais ». Cependant, à la différence du terme Wafû, la terminologie Wayô est spécialisée. Son usage se limite à la calligraphie et à l’architecture. De plus, Wayô est employé par opposition à Karayô, « style chinois », alors que Wafû s’oppose à Yôfu, 洋風, « style occidental ».

Selon une définition restreinte, Wayô désigne la première période de la calligraphie de style japonais, celle de l’invention des signes phonétiques Kana, 仮, et de leur épanouissement, invention et épanouissement parallèles au développement de la poésie japonaise, Waka, 和歌, à l’époque Heian (VIIIe-XIIe s.). Le style Wayô est défini dans les traités de calligraphie composés durant cette périodeet ensuite, de façon plus détaillée, au XIIe siècle dans le traité intitulé Saiyôshô, 才葉抄.

La calligraphie de « style japonais », Wayô, connaît son plein épanouissement avec les trois calligraphes connus sous la désignation de Sanseki, 三跡, « les Trois Traces », abréviation faisant référence aux manuscrits que nous ont laissés les calligraphes les plus talentueux de cette période : Ono no Tôfû, 藤原道風 (894-966), Fujiwara Sukemasa, 藤原佐里 (944-998) et Fujiwara Yukinari, 藤原行成 (972-1027). L’époque au cours de laquelle « les Trois Traces », Sanseki, ont été actifs s’étend sur une durée de 130 ans. C’est durant ces années que se développe le Wayô en même temps que le sentiment esthétique japonais.

Les œuvres calligraphiées par les Sanseki se sont répandues grâce à la pratique de cadeaux luxueux appelés Tehon, 手本 (« manuel »), cadeaux offerts lors de cérémonies officielles et destinés à l’usage quotidien des courtisans. Ces manuels servaient principalement de modèles pour l’écriture. Les Tehon les plus couramment offerts à l’époque Heian consistaient en la copie calligraphiée d’après une anthologie de poésie japonaise, le Kokinwakashû, 古今和歌集 (905), ou en la copie d’un recueil de poésies sino-japonaises, le Wakanrôeishû, 和漢朗詠集 (en deux volumes, 1012 environ). Ces prestigieux manuels servaient autant à l’apprentissage de la composition de poèmes qu’à leur lecture à voix haute. Enfin, ils étaient employés dans l’apprentissage de la calligraphie de style Wayô.

À une époque ultérieure, les œuvres des Sanseki seront conservées sous la forme de collections de fragments de calligraphies, Kohitsugire, 古筆切. Il s’agit littéralement de « fragments de vieux pinceaux », c’est-à-dire de fragments d’anciennes calligraphies attribuées à des calligraphes de talent. Mentionnons l’exemple du Kôyagire, 高野切, qui n’est pas calligraphié par un des calligraphes désignés ci-dessus, mais qui reste le plus ancien manuscrit calligraphié du recueil de poésie Kokinwakashû. Ce manuscrit est conservé sous forme de fragments et peut être considéré comme la meilleure calligraphie de Kana de « style japonais », Wayô.

Ono no Tôfû, 藤原道風(894-966), le premier des trois Sanseki, est considéré comme le fondateur du Wayô. Sa calligraphie est très influencée par celle de Ôgishi, 王義之 (303-361), son illustre modèle chinois. Cependant, le graphisme du style régulier, Kaisho, 楷書, présente chez Ono no Tôfû plus de souplesse et celui du style cursif, Sôsho, 草書, est plus fin et nerveux dans les traits de liaison que celui de Ôgishi.

Fujiwara Sukemasa, 藤原佐里 (944-998), a subi pour sa part l’influence de Ono no Tôfû, son aîné, mais son style est plus fluide et présente une grande liberté d’expression dans le style cursif, Sôsho.

Fujiwara Yukinari, 藤原行成 (972-1027), a étudié la calligraphie d’après Ôgishi et a également subi l’influence de Ono no Tôfû. Il représente l’achèvement du Wayô en ce qu’il réalise la synthèse des deux grands calligraphes fondateurs, Ôgishi en Chine et Ono no Tôfû au Japon. Son style de calligraphie a de la souplesse et de l’élégance, notamment dans le style semi-cursif, Gyôsho, 行書. Les caractères calligraphiés sont généralement plus fins que ceux de Ono no Tôfû et plus uniformes. Enfin, Fujiwara Yukinari calligraphie également en Kana.

Nous ne pouvons pas présenter le « style japonais », Wayô, sans faire un rappel historique concernant la calligraphie des Kana, celle-ci étant représentative de l’âge d’or du Wayô. Il existe plusieurs systèmes de signes phonétiques Kana correspondant chacun à un moment de la formation de l’écriture phonétique japonaise. Ces différents systèmes d’écriture phonétique sont généralement utilisés sans distinction par les calligraphes lorsqu’ils composent une œuvre d’après un poème japonais. On distingue parmi les systèmes d’écriture phonétique en Kana les Manyôgana (encore appelés Magana ou Otokode), les Sôgana, les Hiragana (encore appelés Onnade) et les Katakana.

Les Manyôgana, 万葉仮名, sont des idéogrammes employés à titre strictement phonétique et sans tenir compte de leur sens. Ce sont les premiers signes phonétiques japonais. On les désigne par l’appellation Manyôgana parce qu’ils étaient employés à l’époque Nara afin de transcrire le recueil de poésie japonaise intitulé le Manyôshû, 万葉集. Ces premiers Kana sont calligraphiés en style régulier, Kaisho, ou en style semi-cursif, Gyôsho. On les appelle aussi Magana, 真仮名, ou Otokode, 男手, respectivement « vrais signes » et « écriture des hommes ». Leur nombre s’élève à environ mille signes. Ce nombre élevé de signes ne facilite pas l’emploi des Manyôgana et leur lecture deviendra de plus en plus problématique à l’époque Heian à cause de l’évolution de la langue japonaise.

Les Sôgana, 草仮名, sont des signes phonétiques calligraphiés dans un style cursif, Sôsho, intermédiaire entre le style de l’« écriture des hommes », mentionné précédemment, et le style de l’« écriture des femmes », Onnade, 女手. Le meilleur manuscrit calligraphié en Sôgana s’intitule Akihagijô, 秋萩帖. Il est attribué à Ono no Tôfû pour la calligraphie de la première partie du manuscrit et à Fujiwara Yukinari pour celle de la fin du manuscrit.

L’« écriture des femmes », Onnade, 女手, est un style d’écriture en Kana plus simplifié encore que le style cursif, Sôsho. Par exemple, l’idéogramme 和 (wa) s’écrira わ afin de transcrire le son wa. Il s’agit de la transcription phonétique la plus couramment employée de nos jours dans l’écriture du Japonais. Elle est connue sous l’appellation tardive de Hiragana, 平仮名. À l’époque classique, le style Onnade était utilisé conjointement avec les signes phonétiques déjà mentionnés, à savoir les Manyôgana et les Sôgana. La calligraphie des femmes, Onnade, s’est d’abord développée dans des écrits d’ordre privé, comme la correspondance, avant de se répandre et d’être employée pour l’écriture de la poésie japonaise. Le style de l’ « écriture des femmes » s’est fixé dès le milieu du XIe siècle et les calligraphies ont ensuite été transmises dans les collections de fragments, Kohitsugire, sous une forme le plus souvent anonyme.

L’écriture Katakana, 片仮名, consiste en un usage phonétique des idéogrammes par sélection d’une des parties les composant. Par exemple, on utilise le trait ノque l’on emprunte à l’idéogramme 乃, afin de transcrire le son no, l’idéogramme 乃se lisant no. Il s’agit d’un style régulier. Les signes phonétiques sont calligraphiés en Kaisho et sont employés par l’administration ainsi que par les temples afin d’indiquer la lecture des idéogrammes. Les Katakana ont ensuite été calligraphiés indépendamment des idéogrammes et ont acquis leur forme actuelle à la fin du XIIe siècle.

elon une définition élargie, le « style japonais », Wayô, n’est pas exclusif d’une période de l’histoire de la calligraphie japonaise. Il a survécu à l’époque moderne grâce aux collections de fragments et s’est transmis au sein de lignées de calligraphes. Ainsi, le Wayô tardif est plus particulièrement représenté par des calligraphes prenant de préférence pour modèles des manuscrits représentatifs du « style japonais » de l’âge classique. Le moine et poète Ryôkan, 良寛 (1758-1831), par exemple, calligraphiait d’après Ono no Tôfû et son style de Kana est influencé par l’écriture des Sôgana que l’on observe dans le manuscrit Akihagijô cité ci-dessus.

Le courant de calligraphie de « style chinois », Karayô, s’est développé parallèlement à celui de la calligraphie de « style japonais », Wayô.On distingue généralement trois vagues d’importation de la culture chinoise au Japon. La première est liée à l’introduction de l’écriture chinoise à l’époque Nara, la seconde à la naissance de la culture Zen au Japon, à la fin de l’époque Heian et à l’époque Kamakura, enfin la dernière vague d’importation de la culture chinoise est marquée par l’influence du confucianisme à l’époque Edo. La calligraphie de « style chinois », Karayô,s’est d’abord développée dans les temples de bouddhisme Zen après la seconde vague d’importation de la culture chinoise au Japon, c’est-à-dire à l’époque Muromachi. Elle s’est ensuite répandue à l’époque Edo dans la classe des lettrés versés dans l’étude du confucianisme.

Au niveau stylistique, la calligraphie Karayô se distingue par son architecture et son caractère imposant. La calligraphie Wayô présente en comparaison plus de légèreté : moins technique que la calligraphie de « style chinois », la calligraphie de « style japonais » exprime un état d’âme.

D’autre part, le calligraphe de style Wayô a développé un sens aigu de la composition libre avec l’écriture des poèmes japonais en Kana. Les signes calligraphiés en style cursif s’affranchissent de l’alignement régulier en colonnes et sont parsemés sur la feuille de papier. On désigne en calligraphie ce style de composition par le terme de Chirashigaki, 散書 : « calligraphie en composition libre ».

Enfin, la calligraphie de « style japonais », Wayô, ne s’est pas transmise jusqu’à nous à travers les mêmes objets et sur les mêmes supports que la calligraphie de « style chinois », Karayô. La composante matérielle de la calligraphie de style Wayô sera particulièrement sensible au niveau des supports, des formats et, par suite, de la présentation des œuvres. Ainsi le terme Wayô, « style japonais », ne désigne pas seulement un style de calligraphie mais aussi un objet culturel.

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Cet article est issu du Pinceau d’avril, Journal de calligraphie japonaise, numéro 12, avril 2011.

Le Pinceau d’avril est la revue publiée par l’Institut de calligraphie de Toulouse.

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